Le Radeau.

La vie c'est un peu comme un long voyage sur l'eau, il y a différentes sortes de bateaux, de mers et des océans différents...

Moi je suis née dans un océan inconnu, embarquée dans un petit radeau pour lequel mon équipement n'est pas adapté...

Je n'ai rien pour pagayer, alors que je bats des mains... Dans l'eau froide de cette immense étendue d'eau à perte de vue.
Je me prend d'immenses vagues en pleine gueule à chaque tempête, des fois je bois la tasse, et elle manque de m'étouffer...

Parfois le radeau chavire... Mais jusque là, je suis toujours parvenue à remonter dessus, même si j'ai faillis me noyer plus d'une fois!
Quelque fois, le mouvements des marées se fait tellement violent, qu'il brise mon radeau en petites pièces... Dans ces moments là, comme tombé du ciel, je trouve des liens, comme des cordes bien solides. Ce sont comme de gros cadeaux qui me donnent alors l'énergie qu'il me manque pour ramasser tous les morceaux. Ils me permettent de m'accrocher et de le rapiécer en faisant des noeuds bien serrés entre les tronçons de bois imbibés d'eau, pour qu'il puisse continuer à flotter... Toujours...

Dans des moments de fatigue immense et de désespoir aussi infini que les étendues d'eau qui m'entourent, il m'est arrivé deux fois de délibérément me jeter à l'eau... Mais c'est à croire que mon radeau tient plus à moi que moi-même... Il a toujours fini par me remettre à bord...

Sans doute aidé par la force du vent venant du ciel...
Parfois, je serais bien tenté de réessayer de me jeter à l'eau, encore une fois...

Mon radeau est usé, il ne trouvera peut-être plus la force de me rattraper...
Mais je ne peux pas...

Dans mes courants... J'ai embarqué 3 petits matelots, et si je disparaissaient dans les profondeurs, je sais que leurs petites mains fragiles n'auraient pas la force nécessaire pour défier tous les temps qu'ils leurs restent à parcourir avant de pouvoir diriger leur propre navire...
Il y en a même un qui, je le sais, demeurera trop fragile pour prendre un jour la barre de son propre bateau, il restera dépendant de moi et de mon petit radeau... Et je prendrais soin de lui autant que possible... Comme le petit prince qui est responsable pour toujours de ce qu'il a apprivoisé!
Je suis devenue malgré moi, le capitaine d'une vie sans espoire... Mais je refuse de me laisser abattre et je continue.

Peut-être qu'un jour, je trouverai des rames pour mieux avancer...

De temps en temps je croise des îles, soit elles sont arides et désertiques, soit elles sont occupées par des populations auxquelles je n'appartiens pas...
Je suis le capitaine d'une vie sans avenir...

Parfois, par temps calme et ensoleillé, je pense que tout va bien... Mais c'est juste l'insolation qui m'invente des mirages, comme des rêves auxquels je crois... mais tellement furtif, le réveil fait mal à la tête.

On dit que le bout du tunnel on finit toujours par le voir... Mais le tunnel, je ne le vois pas moi!

Je ne vois que des grands vides qui m'offrent l'illusion d'être pleins.

A force de battre des mains comme une folle pour avancer, le poid de mes 3 petits hommes avec moi, et tous leurs bagages, puis les miens qui s'accumulent... Ils deviennent tellement énorme sur mon petit radeaux, que je porte tout sur mon dos et mes épaules, à force, ça me fait mal...
Je pensais qu'à persévérer, à ramer de mes propres mains, il finirait bien par me pousser des ailes, alors je m'envolerais!

...Mais je suis bien trop encombrée, il ne me poussera jamais de plumes... Puis je suis devenue trop lourde pour défier l'attraction terrestre.

Alors j'attends... Et je me trouve parfois bête d'attendre...

Attendre quoi? Autre chose? Je ne pense même pas qu'autre chose puisse exister pour moi ou pour mes 3 petits marins...

Mais j'espère quand même...

Et je leur raconte de belles histoires, pour qu'ils y croient, pour que les étoiles qui brillent dans leurs yeux, continuent d'éclairer ma route...

                                                                                                  Doro