On me dira qu'il faut du temps
Qu'il mène tout à son point
Qu'il est le seul compétent
A guérir mes blessures avec soin
Laisse donc du temps au temps
Il te prendra au creux de ses bras
Qu'à tout il faut cette ingrédient
Laisse-le donc s'enlasser de toi
Ce que j'accorde au temps
Que je conjugue au présent
Qui ne sonne juste qu'au passé
Que mon future ne sait plus accorder
Tous ces dictons aux mains des lapidaires
Que l'on me répète, que l'on me jette
Que je reçois comme des pierres
Qui me frappent et qui me blessent
Elles me mettront hors de moi
D'un ressentiment rebutant
Mais je me surprendrai parfois
A radoter tous ces mots plats
Qui me protège des tabous
Aligner la pluie au beau-temps
Comme une clé qui passe partout
Comme si le temps passait vraiment
Mais le temps est resté suspendu
Depuis qu'il a creusé sa tombe
Au centre de mon espace défendu
Mon coeur lui sert de catacombes
Ce chapelet d'intants qu'on me confère
Viendra à bout de mes prières
Ne trouvant que des restants de vie
Sur l'acier de mes souvenirs
Qui ne cèderont jamais à l'oubli
Prenant le temps d'une vie à surgir
Parfois une âme tendre s'arrêtera
Posera des fleurs au pied de sa croix
Ecoutera mes maux soufflés par mes vents
Murmurera ses mots réconfortants
Mais jamais, non jamais assez grand
Pour reboucher ce trou béant
Qui s'est terré dans mes silences
Autant en emporte alors le temps
Que de mon vivant
J'accorde au temps
Quand le temps décide de suspendre
Au cou de mes douleurs les plus violentes
L'horloge continue son infernal tournante
Comme un corps vidé de son esprit
Qu'un engrange maintient en vie
Alors je l'attend le temps, qu'il passe
Ce temps qui jamais ne passe.